Accueil > La vie de l’AMAP > Pourquoi chauffer les serres

Pourquoi chauffer les serres

mercredi 17 août 2016, par Corinne Baro

En réponse à la question d’un adhérent, nos maraîchers expliquent leur choix de chauffer les serres, et dans quelles conditions.

Contrairement à ce qui a été avancé, le système de chauffage consomme peu d’énergie. Le système choisi a été étudié et réfléchi. Au départ nous avons envisagé de mettre en place une chaudière au bois déchiqueté, idéale en terme d’impact environnemental, mais elle entraîne des coûts trop importants (minimum 100.000 €). Nous avons donc choisi un chauffage au gaz assez performant (rendement 92 %), qui va être remplacé cet été par une chaudière gaz à condensation avec 110 % de rendement. De plus le tunnel est en double paroi gonflable, ce qui représente une économie de 30 % par rapport à une couverture de serre traditionnelle. Notre fournisseur de gaz est Primagaz, il n’a pas été choisi au hasard : premièrement il est le spécialiste du chauffage de serre, deuxièmement il s’est engagé cette année à acheter plusieurs milliers de tonnes de gaz bio à une entreprise néerlandaise afin d’encourager son développement. Ce gaz bio est produit à partir d’algues et les inventeurs sont arrivés à reproduire en peu de temps ce que la nature a mis des millions d’années à nous offrir.

Revenons-en à notre exploitation. Les plants sont plantés en mars alors que les jours commencent à rallonger et à se réchauffer. Ils sont maintenus à 12 degrés, ce qui leur permet de s’implanter et de croître, mais ne représente pas les conditions les plus favorables (il faudrait pour cela 18 degrés). Cette température faible permet de consommer peu de gaz ; en effet le chauffage est déclenché uniquement la nuit, car le soleil suffit ou presque pour maintenir la température en journée. Notre consommation de gaz est ainsi considérablement limitée. En comparaison, un exploitant que je connais bien et qui fournit Carrefour plante ses tomates en décembre et chauffe à 18 degrés.

Lorsqu’on réfléchit à l’impact environnemental, on peut remettre en question la production sous serre en elle-même. Les plastiques utilisés sont à base de pétrole, remplacés tous les 5 à 7 ans, puis retraités et incinérés. Peut-être devrions-nous revenir à une production strictement de saison, sans tunnel ni chauffage, et pourquoi pas sans stockage en chambre froide, qui consomme de l’électricité, et sans aucun matériel, puisqu’il fonctionne au fioul. Les conséquences seraient les suivantes : nous produirions des salades de mai à octobre/novembre, des tomates en juillet et en août environ tous les 3 ans lorsque les conditions météorologiques seraient favorables, quelques aubergines, poivrons et concombres qui veulent bien se mettre à produire sur la fin de l’été si aucun accident climatique n’a eu lieu. En revanche, nous pourrions inonder les paniers de carottes, poireaux, rutabagas, navets et surtout de choux d’octobre à février/mars. Cela fait rêver ! Alors que j’entends depuis plusieurs années les amapiens se plaindre des paniers d’hiver, notamment parce que 3 choux dans l’hiver c’est beaucoup trop... Les mois d’avril, mai, juin voire juillet seraient bien pauvres en légumes. Comment réagir : se passer de légumes ou en faire venir de pays au climat plus favorable et aux conditions de culture moins transparentes ?

Dans de telles conditions, concrètement, quel serait le taux de renouvellement des contrats Amap en fin d’année ? Je peux parfaitement entendre que la rentabilité, notamment pour le producteur, ne soit pas la priorité de la plupart d’entre vous. Cependant, la réalité est qu’il faut pouvoir vivre de son travail. Certes, la passion du métier reste pour le moment plus forte que tout. Mais depuis maintenant plus de 10 ans d’investissements physique, psychologique et financier, nous devons malheureusement constater que nous n’avons pas encore passé une année complète avec un revenu équivalent au SMIC ! Et cela malgré les 70 heures de travail hebdomadaire, week-end compris, et en limitant nos congés annuels à une semaine maximum ! Face à cette situation, il paraît évident que notre gamme de légumes doit être aussi large que possible, tout au long de l’année. Il est important de souligner que malgré tout, chaque décision est prise en conscience et après réflexion, toujours en accord avec nos valeurs : fournir au consommateur un produit sain et de qualité, tout en respectant l’environnement et le sol.

Nous rappelons que notre exploitation est ouverte à tous. Nous accueillons avec plaisir ceux qui veulent voir notre fonctionnement et nos installations. L’équipe du GAEC reste disponible pour répondre à toutes vos questions. Rappelons qu’Enerique est présent à chaque distribution.

Cordialement.

D’après Adrien Goddet
GAEC Vers les Champs